Rubrique Paiements

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Olivia BERNANOSE

Directrice d’activité Moyens de paiement

La carte bancaire dans le Monde d’après…

« L’Histoire n’est pas prévisible en toutes ses figures », écrit l’historien Marc Ferro. « Mais c’est en décryptant l’homme et son passé que l’on peut comprendre la marche du monde. D’où ce paradoxe d’une Histoire qui domine l’homme plus que l’homme ne domine l’Histoire, dès lors que ce dernier ne la réfléchit pas ». On peut transposer en partie cette réflexion à l’évolution des paiements. La carte bancaire centenaire a traversé l’histoire et ses différentes crises en se renouvelant. Depuis la dernière pandémie et l’avènement de la stratégie « green », dans le monde d’après, la carte reposant sur la puce et la virtualisation s’oriente vers des services complémentaires plus adaptés au contexte socio-économique et environnemental.

Le déploiement du sans contact et de l’e-commerce ont bénéficié très clairement du trou de ver tracé par la pandémie. Les ventes sur internet ont progressé de plus de 8,5% en 2020 grâce à la digitalisation accélérée du commerce de détail, lorsque l‘on constate une baisse pour les commerces de proximité liés principalement aux confinements répétés.

L’encaissement « Pay by link » par API sans communiquer son numéro de carte bancaire à une tierce personne, fonctionnant aussi sur un smartphone émulé en TPE, s’accélère. Ces solutions commercialisées en alliance avec des banques par des Fintechs comme PaytWeak ou PayPlug, ou des éditeurs comme Worldline ou Lyra, offrent un paiement sécurisé de bout en bout.

La tokenisation des données client se généralise. Le token PAR ou Payment Account Reference véhiculée dans la transaction permet de relier la carte à des données et services tels que la fidélité, des objets connectés, sans utiliser les données personnelles du titulaire, facilitant ainsi l’identification du client.

L’un des enjeux majeurs est évidemment la mise à jour des données cartes. Dans la configuration carte non présente et notamment pour les paiements récurrents, sans mise à jour des données, une transaction sur trois n’aboutit pas. Visa et MasterCard poussent ainsi les acteurs à activer respectivement leurs solutions VAU (VISA Account Updater) et ABU (MasterCard Automatic Billing Updater).

Pour doper les ventes et laisser libre le client, on constate le déploiement de nombreuses offres complémentaires. Les unes proposent le service « Buy Now Pay Later », comme le fameux 3X4 fois sans frais ou plus commercialisés par Oney, FloaPay, Klarna, Clearpay ou AfterPay. D’autres solutions solidaires invitent le payeur à activer la fonction « arrondi à l’euro supérieur » soit pour un don porté par l’enseigne comme la FNAC ou Monoprix, ou de l’épargne, comme le présente la néobanque N26 ou l’application MOKA. Des cartes duales permettent de choisir soit un débit différé ou immédiat. Les cartes cobadgées laissent le choix de la marque au point d’acceptation pour bénéficier de commissions moindres.

Enfin, l’abandon du ticket carte bancaire, prévu par la loi française au 1er janvier 2023 et qui sera édité que sur demande, s’inscrit parfaitement dans la mouvance du green.

Tirons de l’Histoire le futur des paiements. Rappelons qu’au moyen âge en Angleterre, les parchemins des actes notariés et juridiques étaient en peau de mouton. Cette dernière plus résistante que le papier et d’une grande finesse avait aussi la propriété de mettre plus clairement en évidence toute occultation ou biffure du texte que le support papier. Ils étaient une garantie anti-fraude pour les actes notariés. En attendant la fin du plastic carte, de la piste magnétique et du panonceau de signature, les innovations se construisent souvent à partir du passé et de résultats d’expérimentations relevant du hasard.