INTERVIEW

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Albertine Lecointe

VP Strategy chez Qonto
Interview d’Albertine Lecointe, VP Strategy chez Qonto

Dans cette interview, Albertine Lecointre revient sur les étapes clés pour Qonto qui vient de fêter son cinquième anniversaire. Elle aborde également les perspectives des prochaines années après le rachat de Penta et elle livre son regard sur le secteur des néo banques en pleine effervescence.

  1. Qonto a fêté en 2022 son cinquième anniversaire. Quel bilan tirez-vous de votre parcours ? Quelles en ont été les étapes clés ?

En cinq ans, Qonto a réussi à devenir un acteur d’envergure européenne, leader de la gestion financière des entreprises. Aujourd’hui, Qonto compte plus de 900 collaborateurs et sert les besoins de plus de 300 000 clients dans quatre marchés européens : la France, l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne.

L’histoire de Qonto a été marquée par quatre phases.

Tout d’abord la genèse du projet lancé par Alexandre Prot et Steve Anavi, les deux cofondateurs. L’idée de Qonto leur est venue au cours de leur première aventure entrepreneuriale commune. Au cours de cette expérience, ils ont expérimenté beaucoup de frustrations liées à leur quotidien bancaire professionnel. C’est pour cela qu’ils ont décidé de créer le service qu’ils auraient rêvé avoir en tant qu’entrepreneurs : Qonto, qui a été lancé en France en 2017. Qonto s’adresse aux créateurs d’entreprises et freelances, qui ont des besoins relativement simples mais attendent une banque professionnelle réactive, ainsi qu’aux TPE/PME qui ont de nombreux besoins pour piloter leur gestion financière. Avec une triple proposition : un produit innovant, misant sur l’expérience utilisateur, un service client hyper réactif et une tarification transparente.

La deuxième phase est celle de l’indépendance. À mon arrivée en octobre 2017, j’ai notamment travaillé sur le développement de notre propre infrastructure bancaire (core banking system) et l’obtention de la licence de paiement, obtenue en 2018. Cela nous a permis de gagner en indépendance pour proposer une expérience plus proche des besoins de nos clients, et de continuer de construire le service que les entrepreneurs et dirigeants d’entreprises méritent.

À partir de 2019, nous avons entamé une phase d’internationalisation. Dès le départ, nous avons fait le choix stratégique de commencer par nos voisins européens (Allemagne, Italie et Espagne). En plus de lancer Qonto dans ces marchés et d’y proposer des IBAN locaux, nous avons développé des partenariats et recruté des équipes au niveau local. Pour renforcer cet ancrage européen, nous avons, par la suite, ouvert des bureaux dans ces marchés soit à Berlin, Milan et Barcelone.

Enfin, la dernière étape est celle de l’accélération de notre trajectoire d’hyper croissance. Elle a été marquée par notre levée de fonds de 486 M€ en janvier 2022, qui nous a fait entrer dans le club des licornes françaises. À l’été 2022, nous avons franchi une nouvelle étape avec l’annonce de notre première acquisition : Penta, pépite fintech allemande, qui nous permet de devenir leader du marché germanique — premier marché en Europe pour les services bancaires aux PME.

  1. Après la croissance organique, vous avez décidé de racheter Penta, un de vos concurrents allemands. Quelles en sont les motivations principales ?

Nous voulions accélérer notre croissance en Allemagne, et le rapprochement avec Penta est apparu comme une évidence : une proposition produit, des cibles, une vision et des valeurs similaires. Nous souhaitions de plus investir de façon pérenne en Allemagne, un marché stratégique où les banques traditionnelles locales ont un poids important. Ce rapprochement s’inscrit donc parfaitement dans notre stratégie et nos ambitions.

  1. Quelles perspectives et ambitions pour les prochaines années ?

Notre ambition est de devenir la solution de gestion financière pour un million d’entreprises en 2025, année pour laquelle nous visons la rentabilité. Notre levée de fonds, intervenue début 2022 dans un contexte favorable, nous permet d’envisager l’avenir avec sérénité et de ne pas décélérer sur cette ambition.

En plus de continuer à développer notre offre, nous allons aussi accélérer dans tous nos marchés, en continuant d’investir significativement dans nos équipes et notre produit. Nous avons à cœur de proposer des solutions localisées afin de répondre aux attentes précises des clients. Par exemple en Italie, nous avons cette année lancé spécifiquement pour ce marché une solution permettant aux entreprises de payer certains impôts locaux directement via Qonto. Enfin, nous poursuivons nos ambitions de recrutement afin de continuer à construire une équipe avec les meilleurs talents.

  1. Qu’est-ce qui rend votre modèle résilient et pérenne ?

Dès le départ, nous avons voulu créer un modèle vertueux pour nos clients et pour Qonto. Notre modèle économique est donc basé sur deux principales sources de revenus : l’abonnement payé par tous nos utilisateurs ainsi que les frais d’interchange. Notre croissance, comme le montrent nos revenus, est donc pérenne. Nous avons d’ailleurs doublé notre revenu l’année passée. Nous mettons tout en œuvre pour poursuivre sur cette trajectoire, et visons la rentabilité pour 2025.

  1. D’une façon générale, quel est votre regard sur le secteur des néo-banques ?

Pour parler du secteur des fintechs en général — Qonto n’étant pas une néo-banque — la dynamique de l’écosystème montre qu’il y avait et qu’il y a encore des opportunités de marché. Certaines fintechs se sont développées sur des verticales hyper précises pour adresser des niches, une approche encore peu commune chez les acteurs traditionnels, et désormais se diversifient. D’autres, à l’inverse, profitent de leur agilité et de leur capacité d’innovation pour lancer de nouvelles offres ultra-spécifiques : par exemple en France, un acteur fintech s’est positionné sur le marché des carburants pour viser les transporteurs. En plaçant l’utilisateur et le service client au centre de la réflexion, les fintechs ont donc rebattu les cartes. Dans le domaine de la gestion financière, les fintechs ont par exemple (enfin !) permis d’adresser les besoins, jusqu’alors ignorés, des petites et moyennes entreprises, colonne vertébrale de l’économie.