Comment miser sur la collecte des données dans le respect des règles et pour l’intérêt des clients ? Ne surestime-t-on pas parfois les usages réels de l’exploitation de ces fameuses données ? La sagacité et la sagesse des consommateurs ou bien des régulateurs éviteront-elles des dérives éventuelles ? Le RGPD réussira-t-il à contenir les ambitions des acteurs ayant une attitude « border line » et à mettre de l’ordre sur certaines pratiques ? 

La bonne et juste utilisation des données disponibles/accessibles sur les prospects et clients est devenue un asset fondamental pour les entreprises de tout secteur dans le but d’optimiser leurs relations d’affaires » (dites-moi ce que vous achetez et je vous dirai qui vous êtes !). Cela permet par exemple : de faciliter la souscription à un bien ou service ; de lutter contre la fraude ; d’autoriser un achat comptant ou à crédit ; de gérer un programme d’avantages ou de promotions ; de cibler les segments de clientèle les plus appétents ; de proposer des offres personnalisées ; de limiter le churn ; d’accompagner les clients dans certains moments clés ; de lancer des produits ou services inédits ; d’anticiper/prédire des évènements…

Outre de la bonne volonté, cela suppose bien sûr une organisation ad hoc, des talents et des moyens d’autant plus conséquents que les quantités de données disponibles progressent de façon exponentielle. Cette opportunité est bien réelle, car aujourd’hui de nombreux ingrédients sont réunis pour autoriser une telle exploitation (la réglementation dans une certaine mesure ; des technologies aussi performantes que le big data, l’IA ou le machine learning ; des consommateurs en permanence connectés et leur appétence accrue pour des services personnalisés ; l’avènement des API…).

S’agit-il aussi d’un mirage quand l’excès de données tue la donnée réellement exploitable et crée un brouillard dont il n’est guère aisé de s’extraire malgré les compétences des meilleurs data scientists ?

Si l’on a le consentement ad hoc, si l’on garantit le respect de la vie privée et la transparence, si l’on applique le bon dosage de communication sans intrusion, on peut penser que les données de paiement permettent aux acteurs les plus astucieux d’enrichir et de renouveler l’expérience utilisateur et de décupler la valeur des propositions, au bénéfice des clients.

Parmi les acteurs, les établissements financiers peuvent sans aucun doute jouer un rôle central dans cette direction et doivent, à tout le moins, éviter par défaut d’actions que d’autres ne le fassent à leur place tôt ou tard. Le fait d’agiter l’épouvantail de la monétisation des données (toute pratique abusive est bien évidemment à bannir) ne suffira pas à les protéger des risques de disruption. Ce qui importe pour les acteurs en place dans la banque/finance, c’est de réussir à changer la donne, de se transformer sans renoncer à leurs valeurs.

La menace est en effet bien réelle quand on observe depuis quelques années la mutation dans la sphère des paiements, des services bancaires (multitude de néo-banques, montée en puissance de la blockchain…), du crowdlending et du PtoP…

Il est possible de procéder par étapes et quick wins successifs :

  • tout d’abord, bien interpréter la réalité de son business grâce aux données disponibles ; faire le tri parmi tout ce qui est exploitable pour dénicher les données les plus pertinentes et utiles ; cerner les domaines d’application les plus appropriés et porteurs ;
  • ensuite, en faire des outils de pilotage et de décision ;
  • enfin, développer un éventail de services et de dispositifs de relations clients qui permettront, de façon flexible et économique, de satisfaire les attentes des clients parce qu’ils seront mieux entendus, reconnus et servis, quel que soit le canal d’interaction (ex : Card Linked Offer ; PFM ; avantages ciblés ; services géolocalisés ; développement d’offres non bancaires avec des partenaires…).

Aujourd’hui, même si certains peuvent se targuer d’être plus agiles ou d’avoir pris de l’avance, les jeux ne sont pas complètement faits. Il importe en tout cas que les établissements financiers, qui ont la légitimité et les moyens d’agir, embrassent à plein l’enjeu des données et en fasse un avantage compétitif durable conforté par une stratégie sans faille.

Bref, pas de money sans données !